jeudi 1 mars 2012

Ombrelle art déco

 
 
En me baladant aux puces de Nyon dimanche dernier, j'ai déniché une petite merveille : cette ombrelle des années 20 en coton peint, avec un manche en bois gravé. Je me suis donc dit que c'était l'occasion de faire un petit article sur l'histoire du costume !


Dans un catalogue des magasins du Louvre datant de 1925, on peut lire : 
Ombrelle japonaise plate, cretonne impression nouvelle, manche bois gravé.
 On retrouve toutes les caractéristiques de l'ombrelle que j'ai trouvée aux puces...

Ombrelle japonaise plate : les années 20 sont, comme d'autres périodes antérieures, fascinées par l'exotisme et notamment par l'orientalisme. La forme traditionnelle des ombrelles japonaises s'oppose à celle des ombrelles occidentales. Les premières sont pratiquement plates, les secondes plus ou moins courbées, parfois en forme de dôme. Ici, on a une ombrelle plate, donc inspiré des modèles japonais.


Cependant, il ne s'agit pas d'une copie ou d'une importation, comme il y en a eu beaucoup à la fin du 19ème siècle. Le tissu est résolument occidental. Le catalogue parle de cretonne impression nouvelle. La cretonne est une toile de coton assez résistante. L'impression textile est une industrie en plein essor dans les années 20, avec beaucoup d'innovations dans le domaine des dessins et des couleurs. Des peintres créent des dessins pour l'industrie textile et de nombreux motifs sont inspirés du fauvisme. 
Le manche en bois gravé, enfin. Il est assez court et épais, recourbé et gravé de motifs d'écailles. Un vernis léger est passé dessus, laissant le bois apparent. On retrouve ici une esthétique qui s'exprime dans les arts décoratifs de l'époque, avec des lignes assez simples et épurées.


Pour comparaison, j'ai trouvé plusieurs photos d'époque, dont voici une sélection (cliquer sur l'image pour voir la source).  
Avec pour commencer trois images de plagistes soucieuses de leur teint :




Dans les années 20, on est à une époque charnière pour le bronzage : le culte d'un corps sain (qui annonce l'essor de la culture physique et la récupération de ces thèmes par le nazisme) côtoie encore l'idée que les femmes distinguées ont la peau blanche, contrairement aux paysans à la peau tannée par le soleil. La tendance commence à s'inverser véritablement en 1936 pour la France, avec les congés payés. De nos jours, être bronzé toute l'année est souvent perçu comme une marque de richesse et un luxe, qui permet de se distinguer des travailleurs qui ne peuvent pas partir en vacances au soleil.  



Celle-ci est très intéressante : on voit que différents types d'ombrelles cohabitent, des courbes et des plates. Mais c'est visiblement la jeune femme du centre, avec l'ombrelle plate et la robe immaculée, qui est la plus chic et la plus à la mode.


La composition géométrique du motif me fait un peu penser au dessin de mon ombrelle. Et la photo ressemble de façon émouvante aux photos de mes arrière-grand-parents...



Ma préférée : je ne suis pas sûre que l'ombrelle soit plate, et le motif est plus art nouveau qu'art déco. La tenue dans son ensemble est plutôt années 1910 qu'années 1920, d'ailleurs... 

Mais je suis pour le mélange des époques !

4 commentaires:

Courson26 a dit…

Coucou Ségolène. Top cette histoire du costume. Les baigneuses ont l'air certes soucieuses de leur teint, mais pas de leur poumon apparemment. J'ai lu dans le petit livre des couleurs de Pastoureau (que tu m'as conseillée) que s'amorce un retour à la peau claire (Heureuses sommes-nous). Les dangers de la surexposition au soleil étant surtout pris en compte par les classes dites "éduquées", la peau cramée des aoûtiens devient vulgaire. So, ne bronze pas trop sous le soleil suisse. Bon courage pour ton stage. Je t'embrasse.

weriem a dit…

Quelle trouvaille! Merci pour les infos sur ces jolies ombrelles!

Ségolène a dit…

@Courson26 : j'avais oublié cette partie du livre de Pastoureau, merci de me le remettre en mémoire ! C'est vrai que lorsqu'on observe le succès d'une femme à la peau diaphane comme Dita Von Tease, on peut y voir un retour à certains canons de beauté d'antant ! Pour ce qui est de mon bronzage, pas de risque : que ce soit en Suisse ou en Provence, ma peau oscille entre blanc et rouge mais ne bronze jamais...
@ Weriem : merci ! C'est ce genre de trouvailles qui m'encouragent à continuer à arpenter les puces, même après plusieurs explorations infructueuses.

Maud a dit…

Ouah! Trop jalouse!